Spectre 5G dans le domaine des fréquences millimétriques.

Pourquoi les mesures 5G à 43,5 GHz exigent un nouveau connecteur K

  • La norme 5G de communication mobile, contrairement à la norme 4G de génération précédent, n’exploite pas uniquement les bandes de fréquences en dessous les 6 GHz, mais également plusieurs autres bandes de fréquences répondant à différents objectifs en termes de communication.
  • Alors que la plupart des bandes de fréquences déjà utilisées se situent dans les gammes de fréquences traditionnellement couvertes par les instruments de test (jusqu’à notamment 10, 20 et 40 GHz), le spectre 5G peut s’étendre sur une bande de fréquences allant de 37 à 43,5 GHz.
  • Les fabricants d’équipements de test et de mesure ont étendu la gamme de fréquences de certains de leurs instruments afin qu’ils puissent prendre en charge des signaux jusqu’à 43,5 GHz. Cependant, la qualité d’une mesure dépend de l’ensemble de la chaîne de transmission du signal jusqu’au connecteur intégré à l’instrument.
  • Dans cet article, Anritsu explique pourquoi le connecteur K présente des caractéristiques permettant de réaliser des mesures dans des conditions satisfaisantes jusqu’à 43,5 GHz.

 

Auteur : Charles Tumbaga, Anritsu

 

Pourquoi exploiter la fréquence 43,5 GHz ?

Si les premiers déploiements de la technologie de communication 5G NR ciblent le spectre en dessous les 6 GHz, ce sont les déploiements dans la gamme de fréquences des ondes millimétriques (mmWave), qui se situent au-dessus de 24 GHz, qui fourniront des capacités de transmission de données à très haut débit. De nombreux pays sont actuellement en train de proposer l’attribution de fréquences dans la bande des 37 à 43,5 GHz. Aux États-Unis, la FCC a proposé en juin 2018 d’utiliser les fréquences 42 à 42,5 GHz pour le service haut-débit commercial ou le service fixe, tandis que le Brésil et le Mexique ont fait des propositions similaires pour le haut débit mobile dans la gamme de fréquences 37 à 43,5 GHz. Le Japon et l’UE ont également fait des propositions dans la gamme des 40,5 à 43,5 GHz pour une fonctionnalité similaire de haut-débit mobile (Figure 1).

Figure 1 : Spectre 5G dans le domaine des fréquences millimétriques.
Figure 1 : Attribution du spectre 5G dans le domaine des fréquences millimétriques dans le monde.

Alors que de nombreux pays en sont au stade des propositions pour le développement de la 5G dans le domaines des fréquences millimétriques, la Chine pourrait être le principal acteur de l’intérêt pour les fréquences jusqu’à 43,5 GHz. Le ministère chinois de l’industrie et des technologies de l’information (MIIT) est à l’avant-garde du développement de la 5G pour les essais de recherche et de développement. La Chine a non seulement proposé des fréquences pour le développement de la 5G dans le pays, mais elle a aussi procédé à des essais de R&D sur la technologie 5G, et elle procède à des essais de R&D sur les produits (qui ont débuté fin 2018).

Conséquences sur les instruments de test et mesure

Ces dernières années, de nombreuses entreprises de test et mesure ont discrètement intégré ce changement de couverture de fréquence, en ajoutant cette option à leurs produits. L’un des nombreux aspects de la couverture de la fréquence 43,5 GHz est de savoir quel connecteur le fabricant d’équipements de test va mettre en œuvre pour permettre à l’utilisateur d’effectuer des mesures à cette fréquence.

Deux approches sont actuellement en vigueur pour opérer à 43,5 GHz. La première consiste à équiper les équipements de test de connecteurs de 2,4 mm. Cette option a un double objectif. Tout d’abord, cela permet facilement d’atteindre un niveau de performance de 50 GHz sur le connecteur, et aussi d’établir la traçabilité. Néanmoins, un problème d’une telle approche est que l’utilisateur devra remplacer tous ses câbles, kits d’étalonnage (le cas échéant), adaptateurs et autres accessoires par de nouveaux composants équipés de connecteurs 2,4 mm. Cela se révèle alors coûteux, car les composants 2,4 mm sont traditionnellement plus chers que leurs homologues en 2,92 mm. L’autre problème qui se pose est celui des nombreux dispositifs sous test (DUT) qui sont équipés de connecteurs K (2,92 mm). Les utilisateurs devront désormais intégrer des adaptateurs à leur solution de test. Même si la plupart des fabricants qui proposent des connecteurs 2,4 mm proposent des adaptateurs pour 2,92 mm, les performances ne seront pas atteintes jusqu’à 43,5 GHz, à moins que la solution ne soit homologuée à 43,5 GHz du côté 2,92 mm. Ceci est en partie dû au problème de ‘’over-moding » (apparition de modes sur le connecteur). Nous examinerons ce concept plus en détail par la suite.

La seconde approche consiste à équiper l’instrument de connecteurs de 2,92 mm et à déclarer qu’il peut effectuer des mesures jusqu’à 43,5 GHz, en précisant que les spécifications de 40 à 43,5 GHz sont « mesurées ». Cette approche présente certains inconvénients dans la mesure où, en l’absence de spécifications, les connecteurs ne sont probablement pas testés individuellement et font en fait partie d’une approche globale basée sur des spécifications d’instruments. Bien sûr, la traçabilité ne saurait être revendiquée en utilisant cette approche « mesurée ».

La conception du connecteur est essentielle

Deux des aspects les plus importants des performances électriques d’un connecteur sont sa capacité d’évolution en fréquence, et sa capacité à répondre aux exigences de performance jusqu’à la fréquence cible de 43,5 GHz. Pour obtenir des performances électriques optimales, l’un des points principaux concerne la propagation des modes dans le connecteur. Pour les dimensions du connecteur K (2,92 mm), seul le mode électromagnétique transverse (TEM) souhaité peut théoriquement se propager pour des fréquences allant jusqu’à environ 46 GHz. En pratique, cette fréquence de coupure est en fait un peu plus basse du fait de la présence des indispensables perles diélectriques nécessaires pour que le connecteur soit utilisable. Étant donné que la longueur d’onde se réduit pour une fréquence donnée au sein du diélectrique, des modes supplémentaires peuvent apparaître et se propager à des fréquences plus basses. C’est pourquoi la plupart des connecteurs K sont spécifiés jusqu’à 40 GHz.

Au-dessus de la fréquence de coupure évoquée, un mode supplémentaire (appelé TE11, qui n’est pas transverse) peut se propager et d’autres modes peuvent se propager à des fréquences encore plus élevées. Cela peut poser un problème dans la mesure où l’énergie du signal d’entrée peut aller et venir entre les modes en fonction des petites imperfections de surface de la perle. Comme les différents modes ont des impédances et des vitesses de phase différentes, cela peut conduire à une réponse en résonance en transmission ou en réflexion. L’échange d’énergie est illustré en Figure 2.

Connecteur K à 43,5 GHz.
Figure 2 : Condition de over-moding entre l’interface air-diélectrique et l’interface perle-air du support de la perle.

L’effet de over-moding au sein des connecteurs apparaît lors des mesures. Cela est clairement visible lorsque l’on mesure la transmission du connecteur : on observe en effet un pic d’atténuation important dans une bande de fréquence étroite. Une fois la résonance du mode passée (le couplage d’énergie entre les modes n’est pas très efficient), la courbe revient sur le chemin de la transmission d’origine. La réponse en fréquence d’un connecteur K avec de l’over-moding est illustrée en Figure 3.

Connecteur K à 43,5 GHz.
Figure 3. Réponse en transmission générique du phénomène d’over-moding vue à 42 GHz.

Il existe des moyens d’éviter l’over-moding (par exemple, en réduisant la circonférence de la perle diélectrique, en optimisant son impédance, etc.) et des mesures peuvent être prises pour réduire le risque de couplage d’énergie entre les modes (par exemple, en étant plus strict sur d’autres tolérances, etc.). En supposant qu’un fabricant surmonte tous les obstacles liés à l’over-moding de son connecteur au-delà de 40 GHz, la confiance dans ses mesures est-elle suffisante ? La réponse à cette question varie d’une application à l’autre, en fonction de la rigueur des spécifications de test. Dans la plupart des cas, ces informations peuvent figurer dans les fiches techniques où la performance est définie en tant que spécification mesurée.

Performances mesurées et performances spécifiées

Le qualificatif qui devient de plus en plus courant pour les spécifications électriques des instruments de test dans la bande de fréquences des 40 GHz à 43,5 GHz est « mesuré ». Une spécification « mesurée » ou typique se réfère à des mesures ayant fourni un ensemble raisonnable de données, quantifiables avec un certain niveau de confiance, et censées être représentatives de toutes les unités. Il ne s’agit pas ici néanmoins d’une approche inhabituelle pour définir des spécifications électriques. Cependant, la différence entre les données « mesurées » fournies et les spécifications au-delà de 40 GHz, est que la marge d’incertitude est d’autant plus faible qu’il existe une chaine de traçabilité ininterrompue, alors que les mesures entre 40 et 43,5 GHz n’offrent généralement pas cette traçabilité. Pour les fabricants, la marge d’incertitude peut être importante car les mesures effectuées sur leurs produits peuvent être déclarés conformes ou non-conformes à une spécification particulière.

En quoi consiste la traçabilité ?

Comme évoqué précédemment, la traçabilité est la voie à suivre pour établir une marge d’incertitude avec fiabilité. La traçabilité est beaucoup plus qu’un moyen d’évaluer la marge d’incertitude, c’est aussi un système d’assurance qualité dont les résultats peuvent être rattachés à un institut national de métrologie reconnu comme le NIST (National Institute of Standards and Technology) américain ou le METAS (Institut Fédéral de Métrologie) suisse.

Les connecteurs ne sont pas tous traçables comme par exemple le connecteur SMA (SubMiniature version A). Bien que largement utilisé, il n’est généralement pas considéré comme traçable à cause de son interface diélectrique, de son manque de normalisation et de ses faibles niveaux de répétabilité. C’est pourquoi les connecteurs SMA ne permettent pas d’effectuer des mesures de précision.

Heureusement, les caractéristiques de base du connecteur K permettent d’assurer cette traçabilité et, avec une conception soignée, on peut obtenir des incertitudes raisonnables et documentables jusqu’à 43,5 GHz. L’aspect le plus fondamental de la traçabilité du connecteur est l’impédance, qui dépend de l’évaluation dimensionnelle et du contrôle des lignes à air utilisées pour effectuer les mesures sur les connecteurs. Les mesures dimensionnelles sont effectuées à l’aide d’outils traçables comme des micromètres laser, des systèmes de mesure tridimensionnelle et des jauges à air. Une fois ces mesures effectuées, l’étape suivante pour établir la traçabilité consiste à relier les performances de la ligne à air au connecteur individuel par le biais de kits d’étalonnage et d’autres composants. Certaines des grandeurs de mesure utilisées pour évaluer les connecteurs sont décrites dans la norme IEEE P287 applicable aux connecteurs coaxiaux.

Nouvelle variante du connecteur K

Face à tous les problèmes énoncés entre la conception d’un connecteur fonctionnel à 43,5 GHz et au besoin de disposer d’une traçabilité établie, Anritsu a créé un nouveau type de connexion fonctionnel connu sous le nom de Extended-K. Les composants Extended-K utilisent des connecteurs de 2,92 mm, fournissent des spécifications traçables jusqu’à 43,5 GHz sans over-moding, et ne nécessitent pas les investissements coûteux que représenterait le passage à des connecteurs de 2,4 mm. Anritsu propose désormais un kit de calibration portable « Thru-Open-Short-Load » en version mâle et femelle (TOSLK50A-43.5 et TOSLKF50A-43.5). Ce kit d’étalonnage comprend également un support d’étalonnage basé sur un fichier de données .s1p pour améliorer les valeurs résiduelles en réflexion et en transmission au cours de l’étalonnage.

Les nouveaux adaptateurs de la série 33K, qui sont insérables en phase, offrent aux utilisateurs une souplesse pour l’étalonnage et pour les mesures jusqu’à 43,5 GHz. Les nouveaux câbles semi-rigides de port de test, 3670AK, disposent de la fonctionnalité Extended-K et offrent des performances sans mode jusqu’à 43,5 GHz.

Les adaptateurs de la série 34KV sont destinés aux utilisateurs qui disposent de connecteurs de port de test en 2,4 mm et qui ont besoin d’atteindre 43,5 GHz tout en assurant une compatibilité avec des composants existants. Ces adaptateurs de la série 34KV sont également traçables et permettent à l’utilisateur de quantifier avec précision sa marge d’incertitude.

Les analyseurs de réseau vectoriels (VNA) ShockLine d’Anritsu disposent également de la fonctionnalité Extended-K jusqu’à 43,5 GHz. Les VNA ShockLine sont le cheval de bataille des instruments pour les tests des paramètre S en production et, associés aux autres composants Extended-K, ils offrent un système de performances sans mode et une chaîne de traçabilité ininterrompue jusqu’à un institut national de métrologie.