Anritsu VNA ME7838A

Comment mesurer les paramètres S au-delà des 120 GHz

  • Pour développer de nouveaux composants et sous-systèmes opérant à de très hautes fréquences, il est essentiel de disposer de modèles précis.
  • La précision des paramètres S dans une large bande de fréquences est un facteur déterminant pour assurer la qualité de modélisation d’un composant.
  • La bande de fréquences des analyseurs de réseaux vectoriels (VNA) est actutellement limitée à 120 GHz. Ce qui n’est pas suffisant pour certaines technologies actuelles ou de prochaine génération.
  • Cet article présente un nouvel analyseur de réseaux vectoriels large bande de 220 GHz, et explique comment un tel instrument permet de simplifier et d’améliorer la mesures des paramètres S sur plaquette de silicium (wafer).

 

Par Christian Sattler, Anritsu

 
La vitesse et le débit des données sont des indicateurs de performance clés pour tout système de communication moderne. Même avec des schémas de modulation modernes et efficaces, cela nécessite des bandes passantes très larges. Cependant, la bande passante est une ressource limitée et coûteuse et le spectre des fréquences jusqu’à 40 GHz est déjà surpeuplé de services de communication sans fil. Le passage à des fréquences plus élevées, telle que la bande D (110 GHz à 170 GHz), permet de sortir de ce dilemme. Mais à de telles fréquences la conception des semi-conducteurs et des circuits devient plus ardue. L’époque où un ingénieur concepteur pouvait démarrer un développement avec seulement quelques calculs, une feuille de papier et un fer à souder est révolue. Aujourd’hui, le développement des circuits électroniques s’appuie sur l’utilisation de logiciels de simulation. Bien que cela permette d’obtenir de bons résultats, même à des fréquences supérieures à 100 GHz, les concepteurs ont néanmoins besoin de modèles précis des composants actifs et passifs. L’absence de tels modèles entraîne des itérations inutiles et coûteuses au cours du processus de conception.

Pour obtenir de bons résultats de simulation de circuit, il est essentiel d’utiliser des modèles à large bande, même si le dispositif final n’est utilisé que sur une bande passante étroite. Il est important d’effectuer la simulation sur une plage beaucoup plus large, notamment pour évaluer la stabilité de la conception. En outre, les émissions hors bande, y compris les harmoniques, doivent aussi être testées pour des raisons réglementaires. Une approche classique pourrait consister à concaténer les résultats de mesure de plusieurs instruments fonctionnant dans des bandes différentes, et à combiner les données. Cette approche présente plusieurs inconvénients dans la mesure où elle introduit des incertitudes, des dérives et des méthodes d’étalonnage différentes selon les mesures réalisées dans les différentes bandes. Par ailleurs, l’utilisation de plusieurs systèmes de mesure prend beaucoup plus de temps que l’utilisation d’un seul instrument.

Pour répondre à toutes ces exigences, Anritsu a développé son ME7838G, un analyseur de réseaux vectoriels (VNA) large bande de 220 GHz. Le constructeur a lancé sur le marché VNA large bande de 110 GHz il y a une dizaine d’années, suivie par l’introduction d’un système de 145 GHz. Basée sur la technologie NLTL (Non-Linear Transmission Line), la capacité 220 GHz existait déjà au centre de recherche d’Anritsu. Le plus grand défi était de développer une connectivité adéquate entre le VNA et le dispositif à tester (DUT). L’une des solutions consistait à développer une interface coaxiale entièrement nouvelle, telle qu’un connecteur de 0,5 mm. La normalisation d’une nouvelle conception de connecteur est toujours une tâche coûteuse et fastidieuse, et étant donné qu’aucun dispositif final à ces fréquences n’utilisera jamais un connecteur coaxial comme interface avec d’autres composants, cette option n’a guère de sens.

Une interface large bande entre le VNA et la sonde sur wafer est indispensable, car le VNA 220 GHz ne servira qu’à la caractérisation de dispositifs sur wafer ; seul un connecteur coaxial peut assurer cette interface, mais sachant que ce sera son seul usage, une conception traditionnelle mâle-femelle avec écrous de couplage vissés n’est pas indispensable. Par contre, la connexion doit être robuste, facile à fabriquer et reproductible ; associer une interface coaxiale à la robustesse et à la stabilité mécanique d’une bride de guide d’ondes est la solution idéale pour relever ce défi. Une interface de connecteur coaxial à bride a donc été développée par Anritsu en partenariat avec MPI pour faciliter les tests en balayage de fréquence continue de 70 kHz à 220 GHz avec le VNA ME7838G.

Cœur de l’analyseur de réseaux vectoriels ME7838G 220 GHz

 

Figure 1. Module MA25400A NLTL 220 GHz avec sonde MPI TITAN.

La technologie NLTL offre les performances requises en matière de rendement de conversion et de plancher de bruit pour une gamme dynamique optimale d’un système aux fréquences millimétriques. L’ensemble se présente sous forme d’un petit boîtier très intégré.
À l’intérieur du module, les bandes sources sont couplées à la ligne de transmission principale par des coupleurs intégrés au substrat. Les échantillonneurs d’harmoniques NLTL convertissent les signaux de test et de référence en fréquence intermédiaire, de 30 GHz à 220 GHz, et sont installés aussi près que possible du port de l’objet à tester (DUT). Une commande électronique de niveau (ALC) permet de contrôler le niveau de puissance dans une plage de 50 dB. Cet ALC est important pour les mesures sur les transistors isolés et les amplificateurs faible bruit (LNA), qui nécessitent généralement des niveaux d’attaque très bas.

Un autre élément important est que la polarisation CC peut être fournie de manière classique à partir du connecteur arrière du module, ce qui évite le besoin d’un té de polarisation à très large bande. Le trajet du signal principal du module est conçu pour présenter une très faible résistance en courant continu, de sorte qu’un T de polarisation Kelvin permettant des mesures CC à 4 points n’introduira pas d’erreur significative.

Interface RF

Les interfaces coaxiales traditionnelles ne peuvent pas être miniaturisées pour fournir une fréquence en mode TE11 supérieure à 220 GHz. La mise à l’échelle des connecteurs coaxiaux à couplage vissé n’est pas réalisable pour des connecteurs dont le diamètre intérieur est inférieur à 0,8 mm. La précision d’usinage requise pour les conducteurs centraux et les conducteurs extérieurs n’existe tout simplement pas. Pour un fonctionnement à 220 GHz, une interface coaxiale de diamètre extérieur 0,6 mm est nécessaire, ce qui exige des approches alternatives pour concevoir l’interface du connecteur. Par ailleurs, pouvoir monter des guides d’ondes relativement lourds (utilisés au-dessus de 110 GHz à des fins d’étalonnage et de vérification) nécessite une interface mécaniquement assez robuste pour que le conducteur extérieur ne fléchisse pas sous la charge par rapport à l’axe du connecteur.

Une bride d’interface de guide d’ondes UG-387/UM assure l’alignement de la connexion coaxiale mâle/femelle de 0,6 mm, évitant ainsi le recours à un connecteur fileté. Un autre avantage est la compatibilité avec une interface standard de guide d’ondes. Cela peut être réalisé avec une transition en ligne entre coaxial et guide d’ondes. Bien que les véritables applications de guides d’ondes ne correspondent pas à l’utilisation normale d’un tel VNA, l’absence d’équipement d’étalonnage (tel qu’un wattmètre) nécessite toujours une telle interface pour les procédures de vérification de routine au-delà de 110 GHz.

Figure 2 : L’interface doit présenter une répétabilité et une durée de vie appropriées à ce type d’application.

 

Figure 3. Le graphique suivant montre la répétabilité de 100 reconnexions suivies de mesures du même dispositif. La répétabilité obtenue n’est inférieure que de 5 dB par rapport à celle d’un connecteur de 0,8 mm. Même après 1 000 reconnexions, l’interface ne présente qu’une dégradation électrique négligeable.

 

Connectivité des dispositifs

Une sonde RF assure la liaison entre l’interface coaxiale d’un VNA et le DUT réel en contact avec une sonde de wafer. Cette sonde nécessite une réponse large bande avec une faible perte d’insertion et une bonne atténuation de retour jusqu’à 220 GHz. Les sondes MPI TITAN™ sont conçues pour être utilisées avec le système VNA ME7838G d’Anritsu. Elles intègrent des pointes de contact MEMS 50 Ohms, s’accouplent directement aux modules MA25400A, et offrent la répétabilité et la durée de vie requises. Le gros avantage de ce système est l’interface de connexion directe entre la sonde et le VNA, qui garantit la meilleure directivité brute, et une stabilité de mesure optimale. MPI propose également le substrat d’étalonnage nécessaire, qui permet l’utilisation de méthodes d’étalonnage modernes telles que LRRM, ALRM et MultiLine TRL.

En plus de ses nombreuses méthodes d’étalonnage intégrées, le système Anritsu ME7838G est également compatible avec QAlibria, le logiciel d’étalonnage de MPI. QAlibria simplifie l’ensemble du processus d’étalonnage sur wafer et garantit la meilleure précision de mesure possible.

Figure 4. Sondes MPI TITAN 220 GHz.

 

Performance de mesure large bande

Bien que le système ME7838G soit totalement spécifié jusqu’à 220 GHz, une image en dira beaucoup plus que de simples données numériques.

Figure 5. Cette courbe révèle la sensibilité au plancher de bruit en ondes millimétriques du module MA25400A NLTL

 
Une autre caractéristique essentielle pour tout VNA est sa dérive et la fréquence à laquelle il doit être ré-étalonné. Les modules NLTL très intégrés offrent une excellente stabilité dans le temps. Ceci est également important car le « de-embedding », qui est nécessaire pour déplacer les plans de référence des pointes de sonde vers le dispositif, a besoin de cette stabilité.

Figure 6. Les mesures suivantes ont été effectuées dans des conditions de laboratoire avec une température variant de quelques degrés. Elles montrent la stabilité à long terme de la magnitude et de la phase sur une période de 24 heures.