- L’intermodulation peut perturber le fonctionnement des amplificateurs ou autres composants électroniques opérant à hautes fréquences utilisés pour des applications de radiocommunication.
- L’intermodulation est le fruit de l’interaction entre deux fréquences dans un signal qui conduit à l’apparition d’une nouvelle fréquence qui n’était pas présente dans le signal d’origine.
- La mesure de la distorsion d’intermodulation permet de qualifier certains amplificateurs et autres systèmes radiofréquences (RF).
- L’intermodulation survient lorsqu’un amplificateur amplifie des signaux de forme complexe.
- Le test de distorsion d’intermodulation (IMD), plus facile à effectuer qu’une analyse de la distorsion harmonique, permet l’évaluation de leur linéarité.
- Christian Sattler d’Anritsu présente la façon de conduire un test IMD avec un analyseur de réseau vectoriel (VNA) et expose les atouts de cette procédure de test.
Les analyseurs de réseau vectoriels (ou VNA pour Vector Network Analyser) constituent sans doute les instruments les plus polyvalents en matière de mesures RF et de micro-ondes. Un VNA permet en effet de tester quasiment tous les types d’appareils, depuis les dispositifs les plus simples, comme les câbles, les filtres ou les amplificateurs, jusqu’aux sous-systèmes les plus complexes. En utilisant les paramètres S (de l’anglais « scattering parameters », coefficients de diffraction), un analyseur de réseaux peut évaluer les caractéristiques d’une unité sous test avec une très grande précision.
Cependant, si les paramètres-S permettent de bien décrire le comportement d’un composant sous test (DUT, Device Under Test) en régime linéaire, il est souvent utile, voir nécessaire, de comprendre également le comportement du DUT en régime non linéaire. La distorsion d’intermodulation, ou IMD, est une méthode de quantification des effets non linéaires qui se révèle aussi importante que les produits de distorsion harmonique ou de second ordre en régime linéaire.
Ceci est particulièrement vrai pour les produits d’intermodulation de troisième ordre (IM3), qui sont situés dans la bande et ne peuvent être isolés. C’est pourquoi la mesure du point d’interception du troisième ordre (TOI, pour Third-Order Intercept Point) se révèle particulièrement importante pour identifier les problèmes spécifiques aux amplificateurs de puissance.
L’une des étapes clés du processus de simulation consiste à créer un modèle précis du DUT, ce qui requiert des données IMD justes pouvant être incluses dans des produits d’intermodulation éventuellement supérieurs (jusqu’à IM9, le neuvième ordre), information nécessaire pour déterminer les performances spectrales optimales d’un composant donné. Même les propriétés asymétriques d’un signal de cinquième ordre peuvent avoir leur importance pour le modèle du composant sous test. Grâce à ces résultats, on obtient des modèles plus justes pour une meilleure simulation de circuit pour concevoir plus rapidement le composant.
L’une des techniques courantes de test IMD, qui est utilisée depuis un certain temps pour caractériser la non linéarité de composants micro-ondes ou RF, consiste à utiliser un signal à deux tons (ou à bi-porteuses). Traditionnellement, la méthode est employée à fréquences fixes en utilisant des générateurs de signaux multiples ainsi qu’un analyseur de spectre (figure 1). Parce que les produits d’intermodulation varient en fonction de la fréquence, ces mesures peuvent s’avérer très longues à réaliser car elles doivent être répétées à diverses fréquences sur l’ensemble de la plage de fonctionnement du composant sous test.
Figure 1 – Méthode traditionnelle pour la mesure de l’IMD exploitant sur un analyseur de spectre
Sur un composant parfaitement linéaire, les deux tons en entrée du DUT sont amplifiés et seulement deux tons sont émis en sortie. Dans la réalité, des harmoniques apparaissent et leurs niveaux constituent une indication des propriétés non linéaires du DUT.
La position des produits d’intermodulation est déterminée par l’ensemble des multiples de fréquences des tons et de leurs différences. C’est pourquoi il est nécessaire de mesurer différents produits d’intermodulation (IM3, IM5, etc.) tout comme la puissance absolue des tons.
Les VNA de la série MS4640B VectorStar de Anritsu peuvent être utilisés pour réaliser les mesures d’IMD , des paramètres-S, point de compression et de gain via une seule connexion au DUT (figure 2), ce qui représente un avantage par rapport à la technique traditionnelle avec un analyseur de spectre. En outre, les routines intégrées de calibration de la puissance rendent toute correction externe inutile.
Figure 2 – Méthode traditionnelle pour la mesure de l’IM avec un analyseur de réseau vectoriel
Les deux signaux sont envoyés vers le VNA par deux sources internes stables et synthétisés (jusqu’à 70 GHz) présentant une large plage de niveaux de puissance et une bonne pureté spectrale. Les deux tons sont ensuite combinés par un mélangeur interne et ressortent sur un port externe.
Grâce à ce montage, associé à l’option logicielle IMDView™, la procédure de paramétrage est simplifiée et permet des mesures IMD efficaces sur une plus large plage de fréquences, avec un seul équipment.
Informations complémentaires
Bien que le recours à une analyse spectrale traditionnelle constitue la plupart du temps un bon point de départ pour les analyses d’IMD d’un composant, elle ne dévoile pas toutes les informations nécessaires pour évaluer le comportement non linéaire d’un DUT. Le point d’interception du troisième ordre IP3, qui constitue une spécification courante pour les amplificateurs, est calculé à partir de l’amplitude des produits IM3 (figure 3). La valeur réelle de IP3 peut avoir pour référence la puissance d’entrée (IIP3) ou la puissance de sortie (OIP3).
Figure 3 – Produits de la distorsion d’intermodulation : calcul de IP3
Du point de vue des mesures pratiques de la distorsion d’intermodulation, les produits devraient être aussi haut que possible au-dessus du plancher du bruit de l’objet de mesure, ce qui peut être obtenu en paramétrant la puissance des tons principaux aussi haut que possible sans comprimer le DUT.
Afin d’observer les performances IMD sur une plus large plage de fréquences, la mesure de la distorsion d’intermodulation balayée est un outil utile pour évaluer les réelles performances du DUT. Le mode IMD à fréquence balayée a pour effet que la fréquence centrale opère un balayage sur la plage indiquée, ce qui signifie que les deux tons issus de la source réalisent également un balayage.
Qualité des mesures
L’un des facteurs clés influençant la précision des mesures IMD est la qualité du montage de mesure : en particulier, les deux sources, le réseau du mélangeur et le récepteur.
De ce point de vue, l’architecture du récepteur VectorStar d’Anritsu, utilisant la technologie brevetée NLTL (Non-Linear Transmission Line), intègre un récepteur offrant une linéarité IP3 de +35 dBm, ce qui garantit que les produits IMD du récepteur soient assez faibles pour ne pas interférer avec les produits IMD du composant sous test.
Présentant une isolation élevée, le réseau du mélangeur garantit l’absence d’interaction entre les deux sources internes. En utilisant un coupleur directionnel, on peut atteindre une largeur de bande de 70 GHz avec des valeurs d’isolation supérieures à 20 dB. Contrairement à un répartiteur de puissance résistif offrant une isolation de seulement 6 dB entre les ports, un coupleur directionnel assure la séparation nécessaire entre les deux tons. De manière générale, une isolation de 20 dB est recommandée quand on veut mesurer des produits IMD sur la plage de -80 à -90 dBc. Cependant, un tout nouveau circuit de stabilisation du niveau de puissance permet d’atteindre des tons très rapprochés sans le moindre problème.
Interface utilisateur
IMDView™ est un pack logiciel qui offre une interface utilisateur graphique permettant de paramétrer les mesures IMD. Il simplifie la complexité des mesures et permet de piloter l’analyseur VectorStar pour un large éventail de mesures.
L’applicatif possède une caractéristique unique : il fournit les bandes de fréquence tout comme les niveaux de puissance requis pour les deux tons. Pendant la calibration de la puissance, il permute automatiquement entre les sources avec pour résultat une puissance calibrée à l’entrée du DUT pour les deux tons.
Pour les balayages simples au-delà de 70 GHz, la version à large bande du l’analyseur de réseau vectoriel VectorStar d’Anritsu fonctionne jusqu’à 110-145 GHz. Le mode IMDView surveille automatiquement la configuration système, selon que le système est configuré pour fonctionner en bande de base ou en ondes millimétriques.
Perspectives
La technologie 5G à venir, opérant sur des largeurs de bande de modulation ultra larges, exigera sans doute un nouveau concept de mesure des composants actifs. Deux tons individuels pourraient ne pas suffire pour caractériser, par exemple, des amplificateurs de puissance de stations de base avec une bande passante de 100 MHz. À la place, il serait possible d’utiliser les paramètres-S modulés pour caractériser de tels composants dans un environnement bien plus proche des conditions réelles que l’utilisation de simples tons à onde continue (CW pour Continuous Wave).
Anritsu a déjà proposé un concept de mesure allant au-delà des traditionnelles mesures IMD (voir figure 4). Basé sur sa gamme de VNA VectorStar, il a été présenté pour la première fois lors de la Conférence européenne sur les micro-ondes de 2015, à Paris (European Microwave Conference).
Figure 4 — Concept de mesure IMD en exploitant les paramètres S