capteur pour détecter simplement et à faible coût des produits nocifs dans l'eau potable développé par le MIT.

Le MIT développe un capteur pour détecter simplement et à faible coût des produits nocifs dans l’eau potable

  • Des chimistes du Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont conçu un capteur capable de détecter d’infimes quantités de substances perfluoroalkyles et polyfluoroalkyles (PFAS), des produits chimiques présents dans les emballages alimentaires, les ustensiles de cuisine antiadhésifs et de nombreux autres produits de consommation.
  • Cette technologie pourrait constituer un moyen rapide et peu coûteux pour tester la présence dans l’eau de PFAS, des produits chimiques dits éternels parce qu’ils ne se décomposent pas naturellement et qui sont nocifs pour la santé et l’environnement.

 
Les alkyls perfluorés et polyfluorés (PFAS) sont un groupe incluant plus de 4 700 produits chimiques d’origine anthropique largement utilisés qui s’accumulent au fil du temps chez l’être humain et dans l’environnement. Ils sont connus sous le nom de «produits chimiques éternels» (forever chemicals), car ils sont extrêmement persistants dans notre environnement et dans notre corps. Ils peuvent entraîner des problèmes de santé tels que des lésions hépatiques, des maladies thyroïdiennes, de l’obésité, des problèmes de fertilité et des cancers.

En développant une nouvelle technologie des capteurs, les chercheurs du MIT ont démontré qu’il était possible de détecter des niveaux de PFAS aussi bas que 200 parties par billion dans un échantillon d’eau. Le capteur qu’ils ont conçu pourrait permettre aux consommateurs de tester leur eau potable et pourrait également s’avérer utile dans les industries utilisatrices de produits chimiques à base de PFAS, notamment la fabricants de semi-conducteurs et d’équipements de lutte contre les incendies.

« Ces technologies de détection répondent à un réel besoin. Nous devons donc être capables de détecter ces produits chimiques et de nous en débarrasser », explique Timothy Swager, professeur de chimie John D. MacArthur au MIT et auteur principal de l’étude, publiée dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (comptes rendus de l’Académie nationale des sciences).

Détection des PFAS

Les revêtements contenant des PFAS sont utilisés dans une multitude de produits de consommation. Outre les revêtements antiadhésifs des ustensiles de cuisine, ils sont également couramment utilisés dans les vêtements déperlants, les tissus antitache, les boîtes à pizza résistantes à la graisse, les cosmétiques et les mousses anti-incendie.

Ces produits chimiques fluorés, largement utilisés depuis les années 1950, peuvent être libérés dans l’eau, l’air et le sol par les usines, les stations d’épuration et les décharges. Le MIT indique qu’ils ont été retrouvés dans les sources d’eau potable des 50 États des États-Unis.

En 2023, l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis (EPA pour Environmental Protection Agency) a créé une « limite sanitaire consultative » pour deux des produits chimiques PFAS les plus dangereux, à savoir l’acide perfluorooctanoïque (APFO) et le sulfonate de perfluorooctyle (SPFO). Ces avis prévoient une limite de 0,004 partie par billion pour l’APFO et de 0,02 partie par billion pour le SPFO dans l’eau potable.

Actuellement, le seul moyen pour un consommateur de déterminer si son eau potable contient des PFAS est d’envoyer un échantillon d’eau à un laboratoire qui effectue des mesures avec un spectrométrie de masse. Toutefois, ce processus prend plusieurs semaines et coûte des centaines de dollars.

Détection rapide et peu coûteuse des PFAS

Pour proposer une méthode moins coûteuse et plus rapide de test des PFAS, l’équipe du MIT a conçu un capteur basé sur la technologie du flux latéral qui reprend la même approche que celle utilisée pour les tests rapides de Covid-19 et les tests de grossesse. Au lieu d’une bandelette de test recouverte d’anticorps, le capteur est intégré à un polymère spécifique appelé polyaniline, qui peut passer de l’état semi-conducteur à l’état conducteur lorsque des protons sont ajoutés au matériau.

Les chercheurs ont déposé ces polymères sur une bande de papier nitrocellulose et les ont enduits d’un agent tensioactif capable d’extraire les fluorocarbures tels que les PFAS d’une goutte d’eau placée sur la bande. Lorsque cela se produit, les protons des PFAS sont attirés dans la polyaniline et la transforment en conducteur, réduisant ainsi la résistance électrique du matériau. Ce changement de résistance, qui peut être mesuré avec précision à l’aide d’électrodes et envoyé à un appareil externe tel qu’un smartphone, donne une mesure quantitative de la quantité de PFAS présente.

Cette approche ne fonctionne qu’avec les PFAS acides, qui comprennent deux des PFAS les plus nocifs : l’acide perfluorooctanoïque (APFO) et l’acide perfluorobutanoïque (PFBA).

En vue d’une solution domestique simple à mettre en oeuvre

La version actuelle du capteur peut détecter des concentrations aussi faibles que 200 parties par billion pour l’acide perfluorobutanoïque (PFBA) et 400 parties par billion pour l’acide perfluorooctanoïque (APFO). Ces concentrations ne sont pas assez faibles pour répondre aux directives actuelles de l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis (EPA), mais le capteur n’utilise qu’une fraction de millilitre d’eau. Les chercheurs travaillent actuellement sur un dispositif à plus grande échelle qui serait capable de filtrer environ un litre d’eau à travers une membrane de polyaniline. Ils estiment que cette approche devrait augmenter la sensibilité de plus de cent fois, dans le but de respecter les niveaux très bas recommandés par l’EPA.

« Nous envisageons la conception d’un système domestique facile à utiliser. En faisant passer un litre d’eau à travers la membrane, on obtient un appareil de mesure de changement de résistance de la membrane. », explique Timothy Swager

Un tel dispositif pourrait constituer une alternative moins coûteuse et plus rapide aux méthodes actuelles de détection des PFAS. Si des PFAS sont détectés dans l’eau potable, il existe des filtres disponibles dans le commerce qui peuvent être utilisés sur l’eau potable domestique pour réduire leur quantité. La nouvelle méthode d’analyse pourrait également être utile aux usines qui fabriquent des produits contenant des substances chimiques PFAS, afin qu’elles puissent vérifier si l’eau utilisée dans leur processus de fabrication peut être rejetée sans danger dans l’environnement.