Une puce électronique en film de phosphure de niobium ultrafin conçue par Standford Engineering.

Des chercheurs ont mis au point un matériau qui conduit mieux l’électricité dans les puces électroniques

  • Des chercheurs de Stanford Engineering ont mis au point un matériau ultrafin qui conduit l’électricité mieux que le cuivre et qui pourrait permettre à la nanoélectronique d’être plus économe en énergie.
  • Dans un article publié en janvier dans la revue Science, ils révèlent que le phosphure de niobium peut mieux conduire l’électricité que le cuivre dans des films de quelques atomes d’épaisseur seulement.
  • Ces films peuvent notamment être créés et déposés à des températures suffisamment basses pour être compatibles avec la fabrication de puces électroniques de dernière génération.

 
Les fils métalliques ultrafins par lesquels transitent les signaux électriques dans les puces électroniques sont devenus le maillon faible des puces électroniques qui gagnent toujours plus en compacité et en complexité. Plus ils sont fins, plus les fils métalliques traditionnels moins ils conduisent l’électricité. Ce qui tent à limiter l’efficacité et les performances électroniques à l’échelle nanométrique.

« Nous brisons un goulot d’étranglement fondamental des matériaux traditionnels comme le cuivre », a déclaré Asir Intisar Khan, premier auteur de l’article. « Nos conducteurs en phosphure de niobium montrent qu’il est possible de transmettre des signaux plus rapidement et plus efficacement à travers des fils ultraminces. Cela pourrait améliorer l’efficacité énergétique des futures puces électroniques. »

Une nouvelle catégorie de conducteurs

Le phosphure de niobium est un semi-métal topologique. Ce qui signifie que l’ensemble du matériau peut conduire l’électricité, mais que ses surfaces extérieures sont plus conductrices que la partie centrale. Lorsqu’un film de phosphure de niobium s’amincit, la zone centrale se rétrécit mais les surfaces ne changent pas. Ce qui permet aux surfaces de contribuer davantage au flux d’électricité et au matériau dans son ensemble de devenir un meilleur conducteur. Les métaux traditionnels comme le cuivre, en revanche, deviennent moins bons conducteurs d’électricité dès que leur épaisseur est inférieure à 50 nanomètres.

Selon les chercheurs de Standford, un film de quelques atomes d’épaisseur de phosphure de niobium non cristallin conduit mieux à travers la surface. Ce qui permet de faire du matériau, dans son ensemble, un meilleur conducteur.

Les chercheurs ont constaté que le phosphure de niobium devenait un meilleur conducteur que le cuivre à des épaisseurs de film inférieures à 5 nanomètres, même à température ambiante. À cette épaisseur, les fils en cuivre peinent à prendre en charge des signaux électriques rapides et perdent beaucoup plus d’énergie en chaleur.

« Les dispositifs électroniques de très haute densité nécessitent des connexions métalliques très fines. Si les métaux ne conduisent pas correctement, ils perdent beaucoup de puissance et d’énergie », explique Eric Pop, professeur à l’école d’ingénieurs, professeur de génie électrique et auteur principal de l’article. « De meilleurs matériaux pourraient nous aider à dépenser moins d’énergie dans les fils minces et disposer de davantage d’énergie pour effectuer des calculs ».

De nombreuses recherches se sont efforcés de trouver de meilleurs conducteurs pour l’électronique à l’échelle nanométrique, mais jusqu’à présent, les meilleurs candidats présentaient des structures cristallines extrêmement précises, qui devaient être formées à des températures très élevées. Les films de phosphure de niobium fabriqués par l’équipe de Standford seraient les premiers exemples de matériaux non cristallins qui deviennent de meilleurs conducteurs à mesure qu’ils s’amincissent.

« On pensait que pour exploiter ces surfaces topologiques, il fallait de beaux films monocristallins très difficiles à déposer », explique Akash Ramdas, doctorant à Stanford et coauteur de l’article. « Nous disposons désormais d’une autre classe de matériaux – ces semi-métaux topologiques – qui pourraient potentiellement servir à réduire la consommation d’énergie dans les systèmes électroniques. »

Les films de phosphure de niobium n’ayant pas besoin d’être monocristallins, ils peuvent être créés à des températures plus basses. Les chercheurs ont déposé les films à 400 degrés Celsius, une température suffisamment basse pour éviter d’endommager ou de détruire les puces électroniques en silicium existantes.

« Si vous devez fabriquer des fils cristallins parfaits, cela ne sera pas adapté à la nanoélectronique », a déclaré Yuri Suzuki, professeur de physique appliquée et co-auteur de l’article. « Mais si vous pouvez les rendre amorphes ou légèrement désordonnés et qu’ils vous fournissent toujours les propriétés attendues, cela ouvre la porte à des applications potentielles dans le monde réel ».

Vers la nanoélectronique du futur

Bien que les films de phosphure de niobium constituent un début prometteur, les chercheurs ne s’attendent pas à ce qu’ils remplacent subitement le cuivre dans toutes les puces électroniques car le cuivre reste un meilleur conducteur dans des films et des fils plus épais. Mais le phosphure de niobium pourrait être utilisé pour les connexions les plus fines. Il ouvre donc la voie à la recherche sur les conducteurs constitués d’autres semi-métaux topologiques. Les chercheurs étudient déjà des matériaux similaires pour déterminer s’ils peuvent améliorer les performances du phosphure de niobium.

« Pour que ce type de matériaux soit adopté dans les systèmes électroniques du futur, il faut qu’ils soient encore meilleurs conducteurs », a déclaré Xiangjin Wu, doctorant à Stanford et co-auteur de l’article. « À cette fin, nous explorons d’autres semi-métaux topologiques.

Les chercheurs travaillent également à la transformation de leurs films de phosphure de niobium en fils étroits pour des tests supplémentaires. Ils souhaitent déterminer le degré de fiabilité et d’efficacité du matériau dans des applications réelles.